Comment financer une petite coopérative d’habitation ?
Dans certains cantons, les projets de coopératives d’habitation ne manquent pas. Dans les centres urbains comme Zürich, Berne ou Genève ce modèle est bien établi et les moyens de financement sont disponibles, par le biais d’aides communales, cantonales, fédérales ou de fondations privées, voire de dons ou de prêts de particuliers qui connaissent bien le modèle. Dans une région périphérique comme le Valais, les choses sont malheureusement plus compliquées, et nous allons ici aborder notre expérience dans le financement de notre coopérative jusqu’à maintenant.
Les débuts ou “L’oeuf ou la poule”
L’un des enjeux important dans notre projet a été de former un groupe, une masse critique pour avoir non seulement un début de ressources financières (à travers des fonds propres ou des avances sur travaux) mais également des ressources humaines pour construire les aspects multiples du projet. Pour les premier-ères coopérateur-rices, cette étape peut être longue et laborieuse, difficile en effet de convaincre des personnes à rejoindre un projet qui est encore flou et où tout reste à faire. Si possible, et c’est le chemin que nous avons emprunté, la création d’un projet sommaire que nous avons appelé un projet “cheval de troie” permet de donner une forme tangible et concrète au projet, et ainsi permettre aux personnes intéressées de se projeter. La création de ce projet a un coût financier bien entendu, dans notre cas heureusement, les deux architectes qui comptaient parmi les premiers coopérateurs ont pris le risque d’assumer ce travail. À ce stade, lorsque quelques personnes se sont jointes au groupe, et après la fondation de la coopérative en tant qu’entité juridique, nous avons abordé quelques banques, et contacté les fondations qui offrent des aides aux projets de coopératives. Ces discussions permettent de cerner les enjeux financiers du projet, mais surtout rendent évident le fait que pour avancer, il faut au moins obtenir un permis de construire.Création d’un projet, saut dans l’inconnu.
Pour obtenir ce permis il faut créer le projet concret et définitif. C’est un moment charnière, car les coopérateur-rices s’engagent financièrement et les montants commencent à être importants, sans garanties à ce stade. Chez nous, un peu moins de la moitié des logements prévus a trouvé preneur à ce stade, et à travers des versements de parts sociales progressifs, nous avons pu mettre en chantier cette phase du travail qui s’appelle avant-projet. Nous avons également pu profiter d’un prêt généreux d’une fondation privée zurichoise pour une durée de 5 ans. Enfin à travers notre site internet et les articles du blog, ainsi qu’en adressant des demandes à des fondations, nous espérons compléter nos fonds en attendant d’être au complet. Alors les fonds propres des coopérateur-rices habitant-es permettront d’effectuer un emprunt bancaire de manière relativement classique.Devenir MOUP!
Moup est l’acronyme de maître d’ouvrage d’utilité publique. C’est un statut qu’une coopérative peut obtenir pour bénéficier de certaines aides mises en place au niveau fédéral. Au niveau financier, deux critères sont fondamentaux pour obtenir ce statut :
a) Limite des coûts, le projet ne peut coûter plus qu’un certain montant déterminé par l’office fédéral du logement.
b) Les loyers des logements ne peuvent dépasser les coûts du marché dans la commune du projet.
En respectant ces éléments, la coopérative peut alors obtenir des prêts pouvant aller jusqu’à 60’000 CHF par logement, selon le standard énergétique et PMR (personnes à mobilité réduite) et bénéficier d’un cautionnement d’une part de son emprunt hypothécaire. Il s’agit de contraintes importantes qui permettent cependant de diminuer les fonds propres ainsi que les loyers.Un jeu d’équilibriste
D’après notre modeste expérience, il est important que les questions du financement soient considérées en parallèle du développement du projet, une sorte de miroir. Il s’agit alors d’effectuer des va-et-vient entre définition des besoins, des rêves, des objectifs et valeurs propres à la coopérative et ses possibilités financières. Un véritable jeu d’équilibriste où chaque élément doit être finement évalué et pondéré pour faire aboutir le projet sans le dénaturer.